Le ver est calé dans la pomme comme une écharde plantée dans le doigt. Il se sent seul dans la chair pourtant douce du fruit. Est-il mal-aimable, grossier ? Il est vrai que son allure, son apparence ne jouent pas en sa faveur. Ses volutes visqueuses sont laides, inspirent le dégoût. Il voit bien que le vide se fait autour de lui, que personne ne souhaite le frôler, le côtoyer encore moins.
Dans sa difficile condition de paria, il évolue seul, recroquevillé sur sa tristesse existentielle, incapable de nouer des liens, exceptés peut être autour d’une tige verdoyante, poussée prometteuse de printemps, sève libératrice. C’est son seul espoir de se nourrir du suc de la nature, une nourriture terrestre indispensable à sa survie. Les autres liens, immatériels, affectifs et sensoriels sont hors de sa portée.
Décidément, la solitude est mauvaise conseillère : elle nous amène à vivre en ver et contre tous !