Elle s’appelait Ode


Ecrits courts, Humeur / samedi, mars 9th, 2024

C’était la dernière journée du séjour. On avait choisi ce troisième musée dans notre pérégrination familiale dans la ville du Nord. On avait trainé nos semelles sur les trottoirs et arpenté de nombreuses salles, pas à la recherche de l’art à tout prix, mais pour se mettre à l’abri de la météo de février. Le thermomètre était monté guère au-dessus de zéro, les nuages cachaient le soleil et, par moments, un petit vent sec nous fouettait le visage. La Scandinavie l’hiver.

Quel hasard m’a donné de la croiser ? En entendant notre bande parler français, elle s’était approchée. Comme serveuse dans le restaurant du musée, elle n’avait pas souvent l’occasion de retrouver sa langue maternelle. Pour elle, l’anglais était courant, elle n’avait pas assimilé le suédois comme elle aurait pu, ou dû ?

Nous discutons, elle avoue qu’elle termine avec joie son cinquième et dernier hiver suédois. Elle n’en peut plus, son retour en France est prévu le lendemain. Comme nous ! Notre vol nous attend le vendredi matin à Arlanda, direction Montpellier via Amsterdam.

Moi : et vous, où rentrez-vous ?
Elle : Grenoble !

J’aurais pu la féliciter, la décorer, cette jeune femme qui avait décidé de quitter la France pour tenter sa chance ailleurs, dans un pays du Nord, si différent. C’était courageux, je le savais. Mais, voilà, elle n’y était pas parvenue.

Moi : vos parents doivent être contents de vous voir revenir !
Elle : oui, toute la famille m’attend, c’est ma mère qui est ravie !

Et là, je me demande encore comment je n’ai pas giflé la jeune fille ! Quelle claque elle m’assénait tout à coup.

Elle : c’est votre fils qui parle très bien suédois ?
Moi : il vit ici depuis douze ans !
Elle : la personne un peu typée asiatique, c’est sa femme, et ce sont leurs filles, les petites brunes ?
Moi : oui, il s’est marié avec une suédoise.
Elle : alors, c’est la belle histoire !

Ode est maintenant de retour en France. Déçue peut être de n’être pas allée au bout de son aventure en Suède. Moi, je pense souvent à sa mère. Et à sa belle histoire à elle, le retour de sa fille ! Mais là, je me sens vraiment minable et égoïste. Tout à coup, c’est moi que j’aurais envie de gifler !!

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